302 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL
ration et de scandale, et leurs chapitres avouaient eux-
mêmes que la passion de la propriété était devenue une
plaie pour eux (1191). Les 13.000, chevaliers du Temple
au, XIIt° siècle s’enorgueillissaient de leurs 10.000 manses,
l’abbaye de Prüm de ses 1.466 domaines. Les Teutoniques
et les Porte-Glaives s’étaient approprié, les uns le sol de
la Prusse, les autres celui des provinces baltiques. Une
abbaye cistercienne, celle de las Huelgas près de Burgos,
avait le territoire de 64 villes en sa possession.
Chapitres et évêques rivalisaient avec les moines. Les
archevêques de Cologne, de Mayence et de Trèves s’étaient
emparé des biens d’empire ; l’archevêque de Riga avait
pris la moitié du sol de la Livonie. Celui de Tolède
tirait 80.000 ducats de revenus de ses biens. Les Ordres
mendiants eux-mêmes, Franciscains et Dominicains, n’a:
vaient pas tardé, ‘suivant l’expression de l’un de leurs
membres, Jacopone de Todi, à « reléguer la pauvreté au
ciel », pour prendre leur part des richesses de la terre. En
Castille, la conquête avait valu à l’Église la possession
d’un tiers des terres, en Angleterre d’un cinquième. Malgré
leur foi profonde, les princes en étaient arrivés au xmIT° et
au XIVe siècle. à essayer d’empêcher, au moyen de mesures
restrictives, l’accaparement croissant du sol de l’Occident
par les corps ecclésiastiques. La mainmorte, cette propriété
immobilisée et inaliénable, avait fini par devenir un péril
pour la société civile.
L'accession des communes et de la bourgeoisie urbaine
à la propriété foncière rurale. — L'attrait de la propriété
foncière, source de la richesse- et -de la considération
sociale, s’exerce même sur les puissances nouvelles qui
surgissent dans la société médiévale. Les communes
urbaines se créent partout un domaine plus ou moins
étendu, soit par achat, soit par usurpation, aux dépens
des féodaux. Elles l’accroissent par leurs acquisitions et
par la colonisation. Elles ont leurs paysans sujets et cen-