CONDITION DES CLASSES RURALES 325
d’un âne ». Mais, à partir du xuP° et surtout du xrn®
siècle, l’habitude des bains chauds et froids se répan-
dit dans les campagnes, où il y eut souvent à domicile
des cuves à baigner et, dans les villages, des étuves ou
établissements de bains. On prit des précautions contre les
maladies contagieuses, en multipliant les maladreries ou
léproseries, qui formèrent en Angleterre jusqu’au cin-
quième des fondations hospitalières. La médecine et la
chirurgie s’établissent jusque dans les bourgs ruraux, où
on rencontre souvent, au xIV® siècle, des chirurgiens jurés,
parfois même des apothicaires. Îl semble que la santé
physique se soit améliorée. Les races rurales de l’Oecident
apparaissent alors lourdes et gauches, de laide hure,
corame disent les satiriques, mais pleines de vigueur,
endurcies par là vie au grand air, les exercices physiques,
débordantes souvent, comme en Angleterre, dans les
Flandres et en France, d’une grosse gaieté sensuelle.
Les classes rurales avaient aussi acquis, dans l’atmos-
phère de liberté et d’aisance, une physionomie morale dont
les traits n’ont fait que se préciser. Elles furent peu raffi-
nées dans leurs goûts, mais joyeuses et pleines d’entrain,
aimant à l’occasion la taverne, les fêtes, la danse, parfois
les dés et les jeux de hasard. Volontiers, elles écoutaient
sur la place du village les récits ou les chansons du ménes-
brel et du jongleur, admiraient aux jours de foire le bate-
leur et le charlatan, écoutaient avidement le sermon du
moine mendiant ou les racontars du colporteur, cette
gazette vivante. De leur passé de servitude, les paysans
gardaient des habitudes de brutalité, de grossièreté,
d’improbité. Leur moralité sexuelle était faible, et ils
n’avaient qu’un médiocre respect pour la femme, dans
laquelle ils n’appréciaient que la mère de leurs enfants et
la compagne de leurs travaux. Ils étaient parcimonieux
et avares, superstitieux et crédules. Mais ils avaient déjà
acquis ces vertus sociales qui en font Pune des forces régé-
nératrices des États du moyen âge. Les classes qui les