BYZANCE, LA RÉORGANISATION DU TRAVAIL 5I
coles, ils s’administraient par l'entremise de leurs assem-
blées et de leurs notables (primates), sous le contrôle des
agents impériaux. L'État, qui ménageait en eux les plus
dociles de ses contribuables et les meilleures de ses recrues
militaires, les protégeait contre les usurpations et les vio-
lences des fonctionnaires et des grands. Il leur accordait,
en cas de trouble de jouissance, l’assistance judiciaire ; il
s’efforçait à leur faire restituer les biens usurpés sur
eux. Il leur accordait un droit de préférence (retrait, pré-
lation, protimesis) pour l’acquisition des biens provenant
des membres de leur classe. Il assura même à leurs parents
en ligne collatérale (cognats) la succession de leurs terres
tombées en deshérence. Une longue lutte s’engagea dans
laquelle le pouvoir impérial réussit à plusieurs reprises à
sauver les deux classes des bénéficiers militaires et des
petits propriétaires libres des entreprises incessantes du
tlergé et de la noblesse. Les empereurs isauriens et macé-
doniens en particulier parvinrent à restaurer et à libérer
partiellement la propriété libre, dont l'existence se maintint
pendant quatre siècles de plus qu’en Occident. Ce ne fut
qu’à la longue, après des vicissitudes sans nombre, que la
ténacité invincible des grands propriétaires laïques et
ecclésiastiques vint à bout de la résistance des petits
propriétaires indépendants. Au x1° siècle seulement, la
plupart des bénéficiers militaires tendent à devenir les
vassaux de la haute noblesse foncière. De leur côté, les
paysans libres, pliant sous le faix des charges publiques,
vivant sous la menace constante de leurs puissants voi-
sins, souvent endettés, dénués de capitaux et de crédit,
dépourvus des moyens de faire face aux crises de la pro-
duction et d’accroître le revenu de leurs terres, tombent
dans le paupérisme. Ils forment dès lors cette classe de
« pauvres », les pénétes, qui doivent se résigner un à un à
aliéner l’indépendance de leur propriété et celle de leur
personne. De cette nombreuse’ classe moyenne qui avait
Sté pendant cinq cents ans le nerf de l’État et le meilleur