60 LE TRAVAIL PENDANT LE HAUT MOYEN AGE
s’appliquent aussi à la technique, en vue d’assurer la
bonne qualité des produits. Les agents de l’État pénètrent
dans les ateliers et les magasins, examinent les marchan-
dises et les livres de comptes. À certaines époques, le
pouvoir a même essayé de fixer le maximum des salaires,
ainsi que le prix des articles de luxe. Cette expérience
désastreuse, inaugurée au temps de Justinien, a été renou-
velée à plusieurs reprises. L'État, protecteur tâtillon et
inquisiteur méfiant, s’est efforcé de tout régler dans l’orga-
nisation corporative ; il n’y a laissé aucune place à la
liberté économique. Mais les membres des corporations
sont des hommes libres, des citoyens, pourvus de mono-
poles et de privilèges qui les garantissent de la concur-
rence, leur assurent la stabilité de l’existence et les rehaus-
sent aux yeux de tous. Dociles administrés, ils se plient
aux exigences de la fiscalité impériale ou aux tracasseries
administratives.
Ce régime, malgré ses défauts, donna à l’industrie urbaine
une forte armature, une haute valeur technique, bien qu’il
ait été peu accessible au progrès et qu’il soit resté, pour la vi-
talité et l’énergie, inférieurà celuidontl’_émancipation du x11°
siècle devait doter l’Occident. Au surplus, en dehors des cor-
porations officielles, l’Orient bénéficia du développement de
nombreux métiers libres, groupés en associations dans une
foule de villes, grandes ou petites, et qui comprirent la masse
des membres du petit commerce et de la petite industrie.
Dans ces groupements, uniquement soumis aux règles géné-
rales de la police économique, l’initiative individuelle et la
liberté du travail purent s’exercer davantage. Les uns et les
autres, corporations et métiers libres, par leur activité et
leur habileté, assurèrent à l’Orient le premier rang dans
la production industrielle,
La production industrielle et ses variétés dans l'Empire
byzantin. — Savante dans sa technique, variée dans ses
formes, l'industrie byzantine posséda pendant six siècles dans