336 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL
Néanmoins, la transformation de la vie politique et
économique de ces pays détermina de profonds change-
ments dans leur organisation sociale. Elle accéléra, la dis-
parition de la propriété collective de tribu chez la plupart
de ces peuples. Elle amena l’altération de l’ancienne pro-
priété de la communauté de famille. Si celle-ci se maintint
comme cadre social avec ses traits caractéristiques, le
travail en commun, le partage égal des produits, l’autorité
des chefs, son domaine cessa d’être inaliénable et indi-
visible. Ses acquêts purent être aliénés ; elle eut le droit
de partager, de vendre, de donner même ses immeubles
et jusqu’à ses terres. Elle admit le testament. En cas
d’absence d’héritiers mâles, elle autorisa les femmes à
succéder. La propriété privée s’étendit à ses dépens, de
même qu’à ceux de la propriété tribale. Rois et princes
s’empressèrent de se constituer de vastes domaines peuplés
de cultivateurs, s’approprièrent la majeure part des forêts
et des terres incultes, revendiquèrent la possession du
sous-sol minier ; mais ils ne surent préserver leur fortune
foncière des usurpations et des aliénations. L'Église cons-
tituæ patiemment par les donations, la colonisation et les
achats une immense richesse territoriale, formée en cer-
tains pays, tels que la Hongrie, la Bohême, la Pologne, la
Russie, de la moitié ou des deux tiers du sol. Une noblesse
s’organisa, en général non fermée et non héréditaire, soit
avec les anciens chefs de tribus, soit avec les riches pro-
priétaires, les fonctionnaires, les soldats et les compagnons
des princes. Elle se rapprocha de plus en plus, dans les
pays balkaniques, de l’organisation de celle de Byzance,
et dans le reste de l’Europe orientale, même en Russie, des
institutions de la féodalité occidentale. Elle eut ses alleux
et ses fiefs, ses domaines qui ressemblèrent au manor
anglais, à la seigneurie française, au grundherrschaft
allemand, et qu’elle morcela en tenures cultivées par la
main-d’œuvre paysanne.
La petite propriété libre et la classe des paysans petits