Full text: Le travail dans l'Europe chrétienne au moyen âge (Ve-XVe siècles)

LES INVASIONS, RUINE DU TRAVAIL 27 
vainqueurs et vinrent grossir les rangs des anciens colons. 
Les Barbares résolurent ainsi le problème de la main- 
d’œuvre agricole et purent vivre, en maîtres oisifs, du 
travail des anciens propriétaires et cultivateurs romains. 
Un sort semblable atteignit une partie plus restreinte des 
anciennes classes libres de la Gaule celtique, de l’Espagne 
et de l'Italie ; il se généralisa à mesure que s’affermissait 
la domination des Barbares. C’est ainsi que dans la pénin- 
sule italienne, les Lombards réduisirent toute la popula- 
tion libre, même les prêtres, à la condition des colons 
romains ou germaniques (coloni, tributarii, manentes, 
aldiones). 
Le colonat lui-même qui, sous l’action des lois de l’Em- 
pire chrétien, avait marqué l’une des étapes du progrès- 
social, prend, à d'époque barbare, l’aspect d’une institution 
régressive, où loin de s’atténuer, la dépendance de l’homme 
s'aggrave. Tandis que le droit romain avait assuré au 
colon la liberté personnelle (ingenuitas) et la stabilité 
sur le sol qu’il cultivait, on vit les coutumes et les lois 
barbares assimiler le colon au serÏ (originarius), c’est-à- 
dire au non libre et à l’esclave urbain ou domestique, 
qu’on pouvait séparer de sa famille et transplanter d’un 
domaine à un autre. D'autre part les serfs (originarit) 
cessèrent d’être distingués des esclaves et leur condition 
devint aussi précaire que celle de ces derniers. Tandis 
qu’à la fin de l’Empire romain, l’esclavage était sur le 
point de s’éteindre, pendant les trois siècles qui suivirent 
les premières invasions barbares, il se reconstitua et s’éten- 
dit avec une extrême rapidité. Les guerres incessantes, 
les razzias, véritables chasses à l’homme analogues à celles 
de l’Afrique centrale actuelle, jetèrent à vil prix sur les 
marchés des millions d’individus. La législation pénale 
des Barbares multiplia le nombre de ces malheureux, en 
décrétant pour d’infimes délits la perte de la liberté, et 
d’autre part, la misère fit de l’esclavage une sorte de refuge 
pour une foule de désespérés. La plus grande partie des
	        
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