Full text: La réforme syndicale en Italie

tique et détermina la fermeture des ateliers et des petites fa- 
briques où l’ouvrier était à la fois patron et artiste. C’est alors 
que naquirent les grandes usines, avec leurs machines bruyan- 
tes et la masse fourmillante de leurs ouvriers, qui jetèrent 
sur le marché d’énormes quantités de produits non pas plus 
finement travaillés qu’auparavant, mais coûtant infiniment 
moins. Dans ces grandes entreprises, il fallait des cerveaux 
organisateurs et directeurs, de grands capitaux d’installa- 
tion, de forts capitaux d’exploitation. La physionomie de 
l’entrepreneur et du capitaliste se détacha nettement de celle 
du travailleur. L’entrepreneur, avec ses propres capitaux, 
mais plus souvent avec les capitaux d’autrui, organisa la 
production, et ce travail, lourd de préoccupations, de respon- 
sabilités et de difficultés l’absorba entièrement. Autour de 
lui se groupa une foule de*techniciens, d’employés, d'ouvriers 
manuels. A mesure que les entreprises et la production 
s’accroissaient vertigineusement, la demande de main-d’œu- 
vre devint énorme et de toutes parts les ouvriers accoururent, 
alléchés par les commodités de l’existence des villes et par le 
mirage d’un salaire fixe et d’une plus grande liberté. Les 
campagnes se dépeuplèrent, et le phénomène de l’urbanisme 
se manifesta. 
Mais dans quelles conditions différentes se trouvèrent 
les nouveaux ouvriers de la grande industrie, en comparaison 
des artisans des siècles passés ! L'introduction des machines 
et du principe de la division du travail, poussé jusqu’à l’extré- 
me, rendit mécanique et monotone le travail de l’ouvrier 
manuel. Il perdit le goût de la production, qui à l’époque 
de l’artisanat, égayait le travail. Enfermé dans de grands 
établissements, il répétait désormais des centaines et des 
milliers de fois le même geste devenu automatique; son esprit 
S’éloigna de plus en plus de la vision d’ensemble de l’œuvre 
à produire, et le travail ne fut plus pour lui que pure fatigue, 
simple moyen de subsistance matérielle. 
Il était naturel que, dans ces conditions, la psychologie 
de l’ouvrier changeât profondément. Tandis que le travail 
devenait pour lui uniquement un sacrifice, la rémunération 
matérielle qu’il en tirait restait fort maigre et tendait plutôt 
à diminuer qu’à augmenter. La première partie du xuxème 
siècle fut caractérisée, en effet, par une offre énorme de 
main-d'œuvre, déterminée par l’exode vers les villes de grandes 
masses de paysans désireux d’abandonner le dur labeur 
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