Full text: Le travail dans l'Europe chrétienne au moyen âge (Ve-XVe siècles)

116 LE TRAVAIL PENDANT LE HAUT MOYEN AGE 
sariñ) doivent ensemble à l’abbaye 5.000 journées de 
travail par an. Le colon a sans doute quelques avantages. 
Il peut fonder une famille, contracter un mariage légal, 
disposer de son pécule. Il vit indépendant sur son lot 
séparé (colonia, manse) et n’est pas astreint à subir la 
surveillance d’un intendant. Sa famille hérite de plein 
droit de sa tenure (sors, hereditas). Sa redevance est inva- 
riable ; elle est surtout payable en nature, mode de 
paiement préféré du paysan. Eile paraît avoir été parfois 
modérée. On a montré qu’à Saint-Germain-des-Prés, au 
Ix® siècle, elle ne dépassait pas 17 franes par hectare. Quant 
aux corvées, elles sont fixes, et parfois réduites à 12 ou 
14 jours par an. Mais sile colon n’est pas toujours un oppri- 
mé, il est un sujet astreint à une perpétuelle obéissan- 
ce, sans recours contre la tyrannie possible du maître. 
En fait, il est devenu taillable et corvéable à merci, et 
le plus souvent, sa condition s’est rapprochée de celle de 
l’esclave rural au point de se confondre avec elle. Au 
Ix° siècle et au x° siècle, de la fusion de ces deux classes 
va, naître celle des serfs. 
La disparition et la transformation de l'esclavage. — En 
effet, l’esclavage, qui avait repris pendant les deux siècles 
des invasions une vitalité nouvelle, tend à se transfor- 
mer et à disparaître pendant les quatre cents dernières 
années du haut moyen âge. De même que la pénurie de 
main-d’œuvre et les besoins de la colonisation agricole ont 
obligé les propriétaires à fixer le colon au sol, de même, 
il a fallu retenir l’esclave sur la terre et encourager son 
travail en relevant sa condition. D'ailleurs, le christia- 
nisme, qui proclame la dignité et l’égalité de la créature 
humaine, sape les fondements de l’institution esclava- 
giste. Assurément la guerre, la misère, la justice crimi- 
nelle, le droit civil continuent, autant que la naissance, 
à alimenter l’esclavage qui à d’ailleurs ses marchés et ses 
recruteurs. Le bétail humain abonde encore. Le prix de
	        
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