118 LE TRAVAIL PENDANT LE HAUT ,MOYEN AGE
servi casati, curtisant, mansionarii, hobarii) sont répartis
dans les tenures du grand domaine, résident sur le lot de
terre et dans la cabane qui leur ont été assignés par le
maître, désireux de les intéresser à la culture et de se
débarrasser du soin de les nourrir. Aux uns comme aux
autres, mais surtout aux seconds, l’affranchissement
apporta un premier bienfait, celui de la liberté personnelle.
L’Église chrétienne s’honora en aidant de toutes ses forces
à la libération des esclaves et en faisant de leur émanci-
pation l’œuvre pie par excellence. Papes, évêques et
moines essaient de mettre un terme à l'esclavage et leur
exemple inspire les rois et les grands. D'ailleurs, dans la
grande œuvre de colonisation qui se poursuit, le capital
lui-même n’a pas tardé à reconnaître quel puissant stimu-
lant est pour le travail l’octroi de la liberté. C’est pourquoi
dans tout l’Occident se multiplient les affranchissements
sous toutes les formes, par acte authentique, devant le
roi, dans l’église, par testament ou par simple lettre.
Rien ne distingue les affranchis les uns des autres que les
noms romains (lébertus, romanus) ou germaniques (lides).
Cette émancipation ne produisit pas une nouvelle classe
de propriétaires ou d'hommes libres, puisque les affran-
chis restaient sous le patronage du maître, fixés au sol
et astreints à divers services, mais elle eut pour effet de
faire accéder à une demi-liberté des millions d’hommes
avec leurs familles, et surtout de hâter la formation d’une
catégorie sociale nouvelle, celle des serfs de la glèbe, dans
laquelle se confondirent les colons déchus, les affranchis et
les esclaves ruraux.
La formation et l'extension du servage de la glèbe. — Un
nom ancien, celui des serfs (servi ou esclaves), désigna
en effet alors une nouvelle et immense classe qui s’éleva
au-dessus de l’esclavage. Le plus grand nombre des culti-
vateurs et des éleveurs fut rangé dans cette catégorie si
bien que, dans tout l’Occident chrétien, serf (servus) et