152 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL
lande, la Hollande, la Frise et la Flandre maritime, la Campi-
ne et le Brabant septentrional durent à l’énergie de leur
population de défricheurs et de marins, à leur isolement
dans les marécages et les landes, de conserver la liberté de
leurs propriétés. Mais partout ailleurs la terre féodale
l’emporta, comme il arriva en Angleterre après la conquête
normande, qui acheva sur ce point l’œuvre de la période
anglo-saxonne. En 1086, le livre terrier normand (Do-
mesday book) ne compte plus que 44.531 propriétaires
libres sur un total de 1.500.000 habitants dans le royaume
anglo-normand. Un quart seulement d’entre eux est
astreint au-service militaire, charge habituelle de la terre
libre. Le reste est tenu) à de légers services et même à
quelques corvées pour les tenures (holdings) qu’elle con-
serve, quoiqu’elle soit rattachée à la classe noble par l’obli-
gation de l’investiture et du serment de fidélité. À mesure
qu’on se rapproche du xIIT° siècle, la liberté absolue de la
petite propriété tend en général en Occident à disparaître,
et l’alleu se rapproche, soit de la terre noble, soit de la
terre roturière. dont il supporte certaines obligations.
La grande propriété dans l’Europe féodale. La grande
propriété ecclésiastique. — La mainmise de la classe mili-
taire et écclésiastique sur la propriété foncière et sur la
majeure part des revenus du travail caractérise donc le
régime féodal.
L'Église, en première ligne, s’est taillée une large part
dans l’attribution du capital foncier et de la richesse qu’il
représente. Par’ l’usurpation des domaines royaux et des
droits souverains, plus encore par les donations dues à la
piété des fidèles, par les acquisitions et les défrichements,
elle a acquis dans l’Europe d’Occident la majeure part des
terres et elle sait en obtenir le revenu le plus élevé. Evêques
et abbés prennent place dans la hiérarchie féodale, en
acceptent ou en subissent la plupart des obligations et
exercent sur leurt sujets les droits de souveraineté. Patiem-