LES CAMPAGNES DANS L’ÈRE FÉODALE 173
Mais il en est bien d’autres qu’il supporte dans
une proportion plus forte que les vilains qui y sont égale-
ment assujettis. Ce sont les redevances en argent et surtout
en nature qu’on nomme les champarts, les complants, les
coutumes, et qui consistent en céréales, vin, bétail, volailles,
tire, les cadeaux à certaines époques de l’an (salutes), les
droits d’usage pour la jouissance des terres indivises de la
seigneurie. Comme le vilain, le ser£ est soumis aux Mono-
poles seigneuriaux ou banalités de four, de moulin, de
pressoir. Souvent il a dû reconnaître au maître le droit
exclusif de chasse, de garenne et de colombier, de même
que le privilège de la vente avant tout autre de la ven-
dange et du vin (banvin). Au seigneur, véritable chef d’État
souverain, le vilain et le sert sont redevables du service
militaire personnel, ou bien tenus de payer des taxes de
remplacement. Ils doivent contribuer-par des taxes extraor-
dinaires (aides) à la chevalerie ou au mariage des enfants
du maître, à sa rançon, aux frais de ses expéditions de
croisade. Au même titre, ils lui fournissent le logement
{gîte), les vivres ou d’autres objets (droits de prise), l’en-
tretien et la nourriture (procuration) pour lui et pour sa
suite. Ils lui paient encore d’autres impôts pour circuler
sur les routes, pour accéder aux marchés, aux halles, aux
foires, aux ports. La police et la justice du seigneur servent
de prétextes aux amendes et aux confiscations. Étrangères
aux saines méthodes de l’administration économique,
les classes possédantes, à l'exception du clergé et des
princes, n’ont pas compris que le meilleur moyen d’ac-
croître leur revenu foncier était de ménager le paysan qui
le procure. Pour elles, et encore plus pour leurs durs et
leurs rapaces agents, intendants, maires, prévôts, bailes,
ammans, souvent pourvus d'offices héréditaires, les masses
rurales, « exploitables à merci », ne sont que des troupeaux
humains, dont on peut tirer parti jusqu’à complet épuise-
ment. avec l’unique souci d’un intérêt momentané.