Full text: Le travail dans l'Europe chrétienne au moyen âge (Ve-XVe siècles)

CONDITION DES CLASSES RURALES 323 
de mas, de fermes se créèrent, de même qu’une foule de 
paroisses. En France, leur nombre n’a pas été dépassé 
pendant cinq cents ans, et il a même, dans certaines régions, 
diminué pendant les périodes suivantes. Les paysans y vi- 
vaient tantôt groupés à l’abri de haies ou d'enceintes de 
terre et de moellons, garnies de tours de guet, tantôt dis- 
persés, le long des routes on au milieu de leurs exploitations, 
en masures, hébergements, bordes, caserios, cascine, hojen, 
auprès de leurs puits, de leur fontaine ou de leur mare, à 
l'abri de quelque vallon ou d’un rideau d’arbres. Leurs 
maisons, ici construites en bois, là en torchis, en pierres, 
en moellons, quelquefois en briques, ou même pratiquées 
dans des collines de calcaire tendre, n’avaient générale- 
ment qu’un étage, étaient couvertes de chaume ou de 
planchettes (aisseulæ), dénuées de vitres et de cheminées, 
sombres, sordides, enfumées, si peu estimées qu’à la fin 
du x1° siècle, une habitation rurale ne valait encore que 
8 à 10 sous. La famille s’y entassait dans quelques pièces, 
à peine séparées des étables et des granges. Elle n’avait 
qu’un mobilier sommaire, formé de lits garnis de paille, 
de tables, d’escabeaux, de bancs massifs, d’une huche et 
d’une arche ou coffre, d’une batterie de cuisine en terre, 
ou en étain et en cuivre chez les plus aisés. Toutefois, à 
mesure que l’aisance se répandit, les inventaires ruraux 
attestent l’apparition, dans les intérieurs rustiques, d’un 
outillage plus considérable, de meubles plus confortables, 
de la poterie d’étain, voire même de l’argenterie. Lie paysan 
dans cet intérieur, ne pouvait s’éclairer qu’à l’aide de 
chandelles de résine ou de procédés plus élémentaires 
encore ; la livre de chandelle de suif coûtait en effet le prix 
d’une journée d’ouvrier. Mais il se chauffait comme un roi, 
tellement le bois était abondant et à vil prix. 
Il s’habillait simplement avec la laine et le lin recueilli 
sur sa terre, filé par sa femme ou ses filles et qu’il avait 
tissé lui-même ou fait tisser par le tisserand du village 
voisin. D’ordinaire, il portait des vêtements de toile les
	        
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